kike Posté(e) 27 mars 2016 Posté(e) 27 mars 2016 http://www.lepoint.fr/culture/alain-decaux-mort-du-prof-d-histoire-des-francais-27-03-2016-2028314_3.php Citer
elkjaer Posté(e) 28 mars 2016 Posté(e) 28 mars 2016 Jim Harrison. Mon écrivain préféré depuis 20 ans. Citer
PaG Posté(e) 28 mars 2016 Posté(e) 28 mars 2016 Il y a 2 heures, elkjaer a dit : Jim Harrison. Mon écrivain préféré depuis 20 ans. C'était pas le leader des Doors? Citer
Ekelund Posté(e) 28 mars 2016 Posté(e) 28 mars 2016 il y a 24 minutes, PaG a dit : C'était pas le leader des Doors? tu confonds avec le guitariste des Beatles Citer
elkjaer Posté(e) 28 mars 2016 Posté(e) 28 mars 2016 Père gémissait. J’ai déduit de la position du soleil matinal et des débris en mouvement à la surface de l’eau que nous dérivions lentement vers le sud, emportés par un courant inconnu. Père s’est tassé sur le siège arrière de la barque en bois et je me suis penché en avant pour le retenir par la chemise et l’empêcher de tomber par-dessus bord. Il avait les deux mains coupées à hauteur du poignet et on lui avait bandé les moignons très serré avec du ruban adhésif industriel. Ses avant-bras, d’habitude maigres et flétris, étaient maintenant gonflés et marbrés de couleurs affreuses. Lorsqu’ils nous avaient poussés dans l’estuaire, à marée descendante et avant l’aube, ils ne m’avaient donné qu’une seule rame. J’en ai clairement pris conscience au point du jour et j’en ai aussitôt perçu tout l’humour : j’étais équipé pour ramer de la main gauche en décrivant des cercles. Car le pouce de ma main droite manquait et la douleur s’atténuait quand je la levais au-dessus de ma tête. Dans la lueur du petit jour j’ai vu une tortue verte ou une caouane et j’ai pris mon pouce, que quelqu’un m’avait fourré dans la poche, pour le lancer vers la bête, mais la tortue soudain inquiète a plongé en se fourvoyant sur mes bonnes intentions. En milieu de matinée le rivage est apparu à l’horizon et j’ai aperçu la côte au sud de Veracruz. Le courant nous emportait vers Alvarado. Après son dernier évanouissement, mon père a repris conscience. Il avait le visage trop tuméfié pour pouvoir parler clairement et maintenant, plutôt que de gémir, il bêlait. Du regard il a exprimé sa demande sans ambigüité et je l’ai doucement poussé par-dessus bord. Il a mis beaucoup de temps avant de se noyer pour de bon. J’observais les écailles de poisson puantes et les fragments de viscères séchés au fond du bateau, puis je levais les yeux et il était toujours là à flotter dans le courant. Et puis enfin, je me suis réjoui de le voir couler. Quelle étrange façon de dire au-revoir à son père. Et une pensée pour toi PaG: On oublie volontiers qu’en moyenne nous mourons sept fois plus lentement que nos chiens. La simplicité de cette loi proportionnelle m’a frappé très tôt, car j’ai grandi dans une région si reculée que durant mon enfance les chiens ont été mes meilleurs amis. Voilà pourquoi j’ai toujours parlé en prenant mon temps; mais si mes cordes vocales avaient été constituées différemment, j’aurais sans doute fort bien grondé, aboyé ou hurlé en humant un danger invisible, situé au-delà de la lumière qui, croyons-nous, nous entoure, ou plus souvent nous ensevelit. Ma mère était une Sioux Hunkapa (eux-mêmes s’appellent les Lakotas), mon père un orphelin venu de l’Est, aux cheveux blanc-gris comme la neige de mars sous laquelle on n’espère nul printemps, un homme sujet à des crises de folie tout au long de sa vie consacrée pour l’essentiel à aider les autochtones à s’habituer à leurs conquérants. Après sa démobilisation pendant la guerre de Sécession et jusqu’en décembre 1890, il se consuma corps et âme dans ce but, choisissant la botanique comme outil de libération et cela dans une région, les Grandes Plaines, peu propice à la culture d’arbres fruitiers ou de buissons à baies originaires de l’est du pays. Le complet échec de la mission à laquelle il avait voué son existence ne me le fait qu’admirer davantage, même si mort il a été beaucoup plus facile à supporter que de son vivant, si terribles étaient les accès d’irrationalité qui s’emparèrent de lui pendant les vingt dernières années de sa vie. J’ai toujours rassemblé mes pensées le dimanche, une habitude acquise dans mon enfance, lorsque mon père renonça à l’Eglise et entreprit mon éducation avec une énergie qu’il faut bien qualifier de désagréable. Il avait peu à peu adopté cette conviction religieuse autochtone selon laquelle chaque jour devrait être un dimanche de piété, et l’absence de toute application immédiate à ses impulsions religieuses fit de moi une proie toute désignée. Quel jeune garçon aimerait vraiment que par les longues soirées d’hiver on lui lise au coin du feu les pages qu’Emerson consacra à la confiance en soi? Ou bien l’été, quand la nuit tombe tard, quel adolescent apprécierait de rester assis à écouter, alors qu’il pourrait encore être dans les collines, de l’autre côté de la rivière Niobrara, à chercher des pointes de flèche avec les chiens? Kate, un airedale, croyait même pouvoir les trouver toute seule, quand elle ne cherchait pas une proie à tuer et à manger, aboyant avec insistance devant la moindre petite pierre aux bords tranchants. Et chaque dimanche soir, je me retrouvais assis à la table de la cuisine pour tirer les leçons de la semaine précédente, griffonnant d’une écriture enfantine dans mon tout premier cahier à couverture bleu ardoise: « Je veus pas hêtre issi. » Harrison était en plus très bien traduit depuis longtemps par Brice Mathieussent, également traducteur de Fante, McGuane ou Ellis. Citer
Nijni Posté(e) 29 mars 2016 Posté(e) 29 mars 2016 On 28/3/2016 at 8:39 AM, elkjaer said: Père gémissait. J’ai déduit de la position du soleil matinal et des débris en mouvement à la surface de l’eau que nous dérivions lentement vers le sud, emportés par un courant inconnu. Père s’est tassé sur le siège arrière de la barque en bois et je me suis penché en avant pour le retenir par la chemise et l’empêcher de tomber par-dessus bord. Il avait les deux mains coupées à hauteur du poignet et on lui avait bandé les moignons très serré avec du ruban adhésif industriel. Ses avant-bras, d’habitude maigres et flétris, étaient maintenant gonflés et marbrés de couleurs affreuses. Lorsqu’ils nous avaient poussés dans l’estuaire, à marée descendante et avant l’aube, ils ne m’avaient donné qu’une seule rame. J’en ai clairement pris conscience au point du jour et j’en ai aussitôt perçu tout l’humour : j’étais équipé pour ramer de la main gauche en décrivant des cercles. Car le pouce de ma main droite manquait et la douleur s’atténuait quand je la levais au-dessus de ma tête. Dans la lueur du petit jour j’ai vu une tortue verte ou une caouane et j’ai pris mon pouce, que quelqu’un m’avait fourré dans la poche, pour le lancer vers la bête, mais la tortue soudain inquiète a plongé en se fourvoyant sur mes bonnes intentions. En milieu de matinée le rivage est apparu à l’horizon et j’ai aperçu la côte au sud de Veracruz. Le courant nous emportait vers Alvarado. Après son dernier évanouissement, mon père a repris conscience. Il avait le visage trop tuméfié pour pouvoir parler clairement et maintenant, plutôt que de gémir, il bêlait. Du regard il a exprimé sa demande sans ambigüité et je l’ai doucement poussé par-dessus bord. Il a mis beaucoup de temps avant de se noyer pour de bon. J’observais les écailles de poisson puantes et les fragments de viscères séchés au fond du bateau, puis je levais les yeux et il était toujours là à flotter dans le courant. Et puis enfin, je me suis réjoui de le voir couler. Quelle étrange façon de dire au-revoir à son père. Et une pensée pour toi PaG: On oublie volontiers qu’en moyenne nous mourons sept fois plus lentement que nos chiens. La simplicité de cette loi proportionnelle m’a frappé très tôt, car j’ai grandi dans une région si reculée que durant mon enfance les chiens ont été mes meilleurs amis. Voilà pourquoi j’ai toujours parlé en prenant mon temps; mais si mes cordes vocales avaient été constituées différemment, j’aurais sans doute fort bien grondé, aboyé ou hurlé en humant un danger invisible, situé au-delà de la lumière qui, croyons-nous, nous entoure, ou plus souvent nous ensevelit. Ma mère était une Sioux Hunkapa (eux-mêmes s’appellent les Lakotas), mon père un orphelin venu de l’Est, aux cheveux blanc-gris comme la neige de mars sous laquelle on n’espère nul printemps, un homme sujet à des crises de folie tout au long de sa vie consacrée pour l’essentiel à aider les autochtones à s’habituer à leurs conquérants. Après sa démobilisation pendant la guerre de Sécession et jusqu’en décembre 1890, il se consuma corps et âme dans ce but, choisissant la botanique comme outil de libération et cela dans une région, les Grandes Plaines, peu propice à la culture d’arbres fruitiers ou de buissons à baies originaires de l’est du pays. Le complet échec de la mission à laquelle il avait voué son existence ne me le fait qu’admirer davantage, même si mort il a été beaucoup plus facile à supporter que de son vivant, si terribles étaient les accès d’irrationalité qui s’emparèrent de lui pendant les vingt dernières années de sa vie. J’ai toujours rassemblé mes pensées le dimanche, une habitude acquise dans mon enfance, lorsque mon père renonça à l’Eglise et entreprit mon éducation avec une énergie qu’il faut bien qualifier de désagréable. Il avait peu à peu adopté cette conviction religieuse autochtone selon laquelle chaque jour devrait être un dimanche de piété, et l’absence de toute application immédiate à ses impulsions religieuses fit de moi une proie toute désignée. Quel jeune garçon aimerait vraiment que par les longues soirées d’hiver on lui lise au coin du feu les pages qu’Emerson consacra à la confiance en soi? Ou bien l’été, quand la nuit tombe tard, quel adolescent apprécierait de rester assis à écouter, alors qu’il pourrait encore être dans les collines, de l’autre côté de la rivière Niobrara, à chercher des pointes de flèche avec les chiens? Kate, un airedale, croyait même pouvoir les trouver toute seule, quand elle ne cherchait pas une proie à tuer et à manger, aboyant avec insistance devant la moindre petite pierre aux bords tranchants. Et chaque dimanche soir, je me retrouvais assis à la table de la cuisine pour tirer les leçons de la semaine précédente, griffonnant d’une écriture enfantine dans mon tout premier cahier à couverture bleu ardoise: « Je veus pas hêtre issi. » Harrison était en plus très bien traduit depuis longtemps par Brice Mathieussent, également traducteur de Fante, McGuane ou Ellis. https://i.imgur.com/6Dqhm4d.webm Normalement réservé à Golum mais j'avais envie Citer
elkjaer Posté(e) 30 mars 2016 Posté(e) 30 mars 2016 Il y a 1 heure, elmö a dit : est-ce que elk connait ? Je connaissais Jean-Pierre Coffe alors que tu fréquentais sans doute encore les bancs du primaires Citer
Wingeeky Posté(e) 30 mars 2016 Posté(e) 30 mars 2016 à l’instant, elkjaer a dit : Je connaissais Jean-Pierre Coffe alors que tu fréquentais sans doute encore les bancs du primaires Que tu as manifestement séchés Citer
è_é Posté(e) 30 mars 2016 Posté(e) 30 mars 2016 à l’instant, Wingeeky a dit : Que tu as manifestement séchés et biiiiiim ! Citer
elkjaer Posté(e) 30 mars 2016 Posté(e) 30 mars 2016 à l’instant, Wingeeky a dit : Que tu as manifestement séchés Ou redoublé Citer
Stormy31 Posté(e) 30 mars 2016 Posté(e) 30 mars 2016 Il y a 2 heures, elmö a dit : est-ce que elk connait ? Est-ce que Elk connaît la référence de Coffe sur le chou farci ? Celle où il prône de faire ce repas pour les ménages modestes à Noël et refuser d'entendre les sirènes de la dinde aux marrons ? ça serait très très fort. Citer
bondurant2001 Posté(e) 14 avril 2016 Posté(e) 14 avril 2016 Howard Marks (Pour ceux qui ont vu Human Traffic, c'est le dealer, un role de composition). Citer
Ekelund Posté(e) 21 avril 2016 Posté(e) 21 avril 2016 Guy Hamilton, réalisateur de 4 James Bond notamment Citer
PaG Posté(e) 21 avril 2016 Posté(e) 21 avril 2016 il y a 13 minutes, Ekelund a dit : Guy Hamilton, réalisateur de 4 James Bond notamment Encore un coup de rosberg Citer
Ekelund Posté(e) 21 avril 2016 Posté(e) 21 avril 2016 à l’instant, PaG a dit : Encore un coup de rosberg Citer
en_congés Posté(e) 21 avril 2016 Posté(e) 21 avril 2016 (modifié) Prince, selon le site TMZ... ou pas, en fait Modifié 21 avril 2016 par BigBross Citer
Messages recommandés
Join the conversation
You can post now and register later. If you have an account, sign in now to post with your account.